Quand on la rencontre, la première chose que l’on remarque, c’est la largeur de son sourire. Un sourire lumineux, authentique. Puis, en échangeant avec elle, on est frappé par la qualité de sa présence et la force du vivant qui l’anime. Ainsi se dessine aujourd’hui la discrète Aïda, une personnalité toute en sensibilité et en créativité. Portrait de cette alchimiste des équipes qui se conjugue toujours au singulier pluriel.
Son tout premier boulot à Aïda, ça a été de dessiner des chaussettes. Si si… Car tout a commencé par des études d’arts appliqués, « parce que j’étais passionnée par ça depuis toute petite ! J’ai toujours dessiné, et avant même de faire mes études, j’avais comme projet d’être directrice artistique dans la publicité… »
« Je voulais faire des logos »
Oui Aïda voulait bosser dans la pub à l’origine… Alors certes, à peine ses études entamées, elle déchante… « Je comprends rapidement que ce qui m’anime, ce n’est pas tout à fait le monde de la pub, et que ça ne va pas le faire au niveau des valeurs, de l’état d’esprit… » Mais Aïda adore ce qu’elle étudie, notamment au niveau de l’identité visuelle, les logos, la typo… À part que l’école en décide autrement : « les profs se sont dit qu’une Africaine, elle ferait mieux d’aller faire des tissus africains ! » Et Aida se retrouve orientée sur une filière de design textile sans vraiment comprendre ce qui se passe. Et sans vraiment se passionner pour les cours. Jusqu’au jour où l’école leur propose de participer à un concours sur de l’innovation en textile. « Il fallait inventer de nouveaux débouchés pour le cuir, pour les mégisseries qui restaient encore dans le Sud de la France. » Aïda décide de travailler sur un projet avec de la lingerie en prenant le concept à contrepied. « La lingerie en cuir, on imagine forcément des trucs noirs, etc. J’ai fait totalement l’inverse, en restant dans des tons de peau et en jouant avec cette sensualité. J’avais mélangé les matières, fait des dentelles en cuir. C’était très très doux comme univers… » Et Aïda gagne le premier prix… « C’était génial ! Et ce qui aussi a fait que ces deux années sont devenues chouette ! » Du coup, Aïda enchaine sur un Diplôme supérieur d’Art appliqués (DSAA) et là, elle s’éclate en travaillant à la fois sur la matière et la réflexion conceptuelle. « Je pense que c’est là que j’ai commencé à voir la profession de designer, non pas comme simplement l’acte de créer de belles choses, mais plutôt comme une façon de regarder le monde et de résoudre des problèmes… » Cette vision ne la quittera pas, et va même la guider dans ses choix professionnels par la suite…
Mais pour l’instant, Aïda cherche son premier boulot.
« Je veux toujours faire des logos »
Elle commence donc par faire des chaussettes « avec des motifs rigolos, des panthères roses, etc. J’adorais ça ! Aller dans l’usine avec les fabricants, faire les tests avec eux, être sur le terrain… » Mais l’usine (comme tous les autres fabricants ou presque) ferme, « et moi, j’avais encore mon rêve d’avant, tu vois, qui me revisitait, de vouloir faire de la comm, être dans l’identité… » Alors elle commence par faire un stage, pour acquérir de la légitimé, dans une boite de comm qui l’embauche très rapidement. Un an plus tard, elle intègre une autre agence davantage spécialisée dans l’identité visuelle. « Je faisais des logos, des logos, des logos… » Pour finalement laisser voix à ses envies de liberté et s’installer en tant que free-lance. Aïda a 25 ans, et le monde à conquérir. « Je disais oui à des trucs que je n’avais jamais fait ! Mais je vais apprendre et je vais réussir à le faire. » Dès qu’il y a un truc à explorer, elle y va, que ce soit du flash, du site, du html… Mais aussi (et surtout), elle pousse ce sujet de l’identité visuelle « en me disant que faire un logo, ce n’est pas juste poser un signe, c’est travailler l’identité profonde de l’entreprise. » Et c’est comme ça que Aïda en arrive à l’intelligence collective, en trouvant comment faire émerger cette identité.
« Je suis aussi facilitatrice »
Quinze ans se sont écoulés. Aïda est désormais graphiste, consultante en communication et facilitatrice (elle s’est formée à l’animation de forums ouverts). « Mais j’ai encore du mal à assumer ce titre de “facilitatrice”… » Jusqu’à ce qu’un de ses clients lui propose de l’embaucher comme directrice marketing. « Et là, j’ai vraiment fait de la facilitation, de l’accompagnement du changement. Parce qu’il était en pleine croissance, en ayant doublé ses effectifs en peu de temps. » D’autant que c’est aussi l’époque de la révolution digitale (la boite est dans le numérique et la téléphonie), il faut donc accompagner également cette transformation, en interne et chez les clients. Sauf que ça ne passe pas tout à fait comme prévu… « En fait, ça marche super bien les forums ouverts, et l’ensemble de la boite est hyper mobilisée pour avancer sur les grands sujets. » Mais la direction, qui sent les choses lui échapper, ne l’entend pas de cette oreille. « Il ne s’imaginait pas que c’était ça l’intelligence collective… » Tous les projets sont ralentis, voire stoppés, la défiance s’installe, il faudra des années pour retrouver l’énergie initiale. Mais c’est une expérience très apprenante pour Aïda. « C’est là que j’ai réalisé qu’il faut non seulement préparer le truc mais aussi vérifier que le commanditaire est vraiment prêt à faire de l’intelligence collective, à mettre en pratique les choses qui vont être décidées, et à définir un vrai périmètre de marge de manœuvre pour ses collaborateurs. »
Et finalement, cinq ans plus tard, Aïda renoue avec son statut d’indépendante « parce que j’avais vraiment cette envie pour le coup de mettre “facilitatrice” comme étiquette, et d’accompagner les PME à développer l’intelligence collective en interne. »
« Trouver le bon angle »
Mais elle est à peine installée qu’elle croise la route de WAP (We Are Peers), organisme de formation spécialisée dans l’apprentissage entre pairs.. Aïda commence à bosser comme facilitatrice sur des sessions. « À l’époque, on faisait surtout des trucs pour les étudiants, ils étaient parfois plus de 1000 ! » Aïda facilite, pilote, fait de la chefferie de projet. Et elle adore ça. Du coup, elle intègre la boite, « et bien m’en a pris car le Covid est arrivé peu après, et en tant qu’indépendante, ç’aurait été compliqué ! » Elle travaille beaucoup, elle facilite beaucoup, elle apprend beaucoup aussi, notamment à faciliter en ligne. Du coup, elle accompagne aussi en parallèle des entreprises à digitaliser leur processus d’intelligence collective. « Peu de gens savaient le faire à l’époque. »
Mais Aida, ce dont elle a vraiment envie, c’est accompagner les équipes. Elle quitte cet emploi, décide de travailler sur l’accompagnement des conflits, et se forme. Beaucoup. « C’était une période hyper intense, à un moment, je faisais trois formations en même temps ! Le coaching d’équipe, les neurosciences décisionnelles, et un module Élément humain ! »
De ces formations, elle ressort grandie (bien entendu) en ayant compris que ce qui l’intéresse, « ce n’est pas tant de résoudre les conflits, mais plutôt d’apprendre aux gens à s’appuyer sur les divergences, l’altérité, pour être beaucoup plus intelligents collectivement. » Elle cherche avant tout à aider les équipes à développer l’intelligence collective au quotidien, « pas juste la vivre le temps d’un atelier, un séminaire, un moment un peu privilégié. »
« Se reconnecter au vivant »
Et puis le Covid est passé par là, « je fais partie des gens qui se sont beaucoup questionnés sur le pourquoi de cette pandémie, sur ce que ça voulait dire de notre monde… » Sa volonté de s’engager plus fortement sur les sujets de transition écologique s’affirme. Car si Aïda a déjà de nombreuses pratiques éco-responsables à titre perso, elle sent bien qu’elle doit aussi être actrice de la transition dans son travail. Alors faire du prosélytisme, c’est pas trop son truc à Aïda, par contre, elle veut pouvoir accompagner les entreprises qui sont « déjà en chemin ». Mais comment ? « Ça m’a pris beaucoup de temps pour trouver l’angle qui allait être juste pour moi, juste pour les personnes que j’accompagne, juste pour ce dont le monde a besoin. »
Car si nombreuses sont les équipes ou les organisations à avoir décidé de fonctionner « autrement », toutes n’arrivent pas forcément à le faire. « Et c’est parfois assez violent. Même plus que dans des équipes traditionnelles, car la distorsion entre discours et réalité vient ajouter des tensions qui n’ont pas d’espace pour se libérer. ».
Et c’est ça qu’Aïda a envie d’accompagner maintenant. Avec la conviction qu’une des clés pour réussir cette vie d’équipe que l’on veut incarner, c’est de se reconnecter au vivant, « au principe du vivant, de fonctionner avec des cycles, d’être plutôt sur les interrelations et la complexité… Qui ne sont pas dans les règles de fonctionnement des entreprises classiques, et qu’on a besoin de reconnecter pour pouvoir les vivre réellement, et pas juste en parler de façon théorique. »
Son compte LinkedIn : Aïda Koné




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